Près de 600 ans après sa mort, Jeanne d’Arc subit de nouveau la question.
Mais cette fois il s’agit de la question scientifique. Le médecin Philippe Charlier, déjà connu pour avoir analysé les restes d’Agnès Sorel, a récupéré ceux de Jeanne d’Arc. Ceux-ci, propriété de l’archevêché de Tours, consistent en un fragment de côte de 8 cm, quelques débris de vertèbres humaines et un morceau de tissu de 15 cm de long en partie brûlé. Il faut y ajouter des charbons de bois ainsi que le fémur d’un chat (animal qui était parfois jeté sur le bûcher en ces tristes occasions).
Ce qui est étonnant, c’est les éléments (certitudes ?) que la science pourrait tirer de ces quelques pièces :
- Sur les restes incinérés, on prélèvera de l’ADN qui indiquera si les restes proviennent d’un homme ou d’une femme. On ne le comparera pas avec celui des descendants car la généalogie n’est pas certifiée.
- Les ossements, passés au microscope et au scanner indiqueront s’ils ont été brûlés plusieurs fois (trois fois ainsi que l’attestent plusieurs traditions). On saura également si la personne était jeune ou âgée.
- La datation au carbone 14 permettra de connaître la date à trente ans près, ce qui évitera de faire remonter les reliques à l’âge de pierre.
- Les pollens piégés dans l’os nous indiqueront la saison pendant laquelle la personne a été brûlée, et peut-être la région.
- Les charbons de bois permettront de connaître l’âge de l’arbre, et sa région d’origine.
- Le morceau d’étoffe, passé à la loupe binoculaire, montrera la trame, l’époque où il a été tissé, et donnera peut-être des dépôts organique de la personne brûlée.
Pas moins de 16 spécialistes sont penchés sur les reliques depuis plusieurs mois, auxquels viendront s’adjoindre des historiens pour éviter toute erreur d’interprétation. Ca fait du monde pour une bout d’os et un morceau de tissu. Et encore, il est possible que tout cela n’ait rien à voir avec notre valeureuse pucelle. Chacun sait qu’il y a au monde suffisamment de saints suaires pour habiller tous les apôtres, et on est toujours étonné de connaître le nombre de stères de bois et de clous qu’il a fallu pour ériger une seule croix !
La seule réponse que l’on n’aura sûrement pas est celle posée au chercheur par un journaliste : « Est-ce que cela nous dira si Jeanne était pucelle ? » (no comment !). Comme disait le grand Charles : « Des chercheurs qui cherchent, on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche. ».
Tout cela me donne le vertige quand je pense aux masses de papiers qu’il nous faut parfois fouiller, au temps que nous devons passer, aux pauvres moyens dont nous disposons, nous les chercheurs de la petite histoire des petites gens, pour trouver une filiation, un lieu, un regard ou un bout de terre !
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