Les associations savent-elles ce que sont le droit d'auteur et ses particularités ?
Il est grandement permis d'en douter lorsque l'on voit les contraintes demandées par celles-ci lorsque leurs adhérents veulent faire des dépouillements :
§ Vous n'avez pas le droit d'exploiter les photos servant à effectuer le relevé.
§ Vous n'avez pas le droit d'utiliser, diffuser, le contenu du relevé que vous faites.
§ Et ceci sous peine de...
Regardons les choses clairement :
1) Le droit d'auteur n'est pas cessible (Code de la propriété intellectuelle L111-1).
2) L'association est gérante du droit d'auteur sur l'ensemble des clichés émanant de plusieurs auteurs mais en aucun cas ne peut s'en prévaloir à son propre et exclusif bénéfice. L'ensemble des clichés représente une oeuvre dite de collaboration (en effet il plausible de dire qui a pris tel ou tel cliché).
3) L'association est gérante du droit d'auteur sur l'ensemble du dépouillement puisque émanant de plusieurs auteurs mais en aucun cas ne peut s'en prévaloir à son propre et exclusif bénéfice. L'ensemble de la base représente une oeuvre dite de collaboration (il est possible de retrouver la trace de qui a dépouillé quoi).
Si les photos n'ont pas été prises par le releveur il n'a donc aucun droit d'en disposer sans autorisation préalable de l'association représentante, en l'espèce, de l'ensemble des photographes.
Le releveur ne peut utiliser l'ensemble du relevé sans autorisation préalable de l'association représentante, en l'espèce, de l'ensemble des releveurs.
Chaque photographe est toujours bénéficiaire du droit d'auteur des clichés pris par lui-même.
Chaque releveur est toujours bénéficiaire du droit d'auteur sur la partie qu'il a lui même effectuée.
En effet le simple fait de remettre une copie, ou l'original, d'un travail ne vaut pas abandon de son droit de propriété intellectuelle puisque celui ci est incessible puisque incorporel.
Dans le cas qui nous préoccupe, relevés effectués à domicile ET sur une série précise de photos, nous ne pouvons parler d'oeuvre collective puisqu'il est possible d'identifier chacun des réalisateurs ET sur le travail effectué par chacun.
Le cas est totalement différent si c'est un employé de l'association qui effectue le travail. Dans ce cas la propriété est exclusivement accordée à l'association.
Il est donc évident qu'une association qui poursuivrait un adhérent publiant sous son nom propre le fruit de son travail ne pourrait qu'être déboutée.
Pour conclure sur le droit d'auteur :
§ Je ne vous dirais surtout pas de ne pas travailler avec les associations, bien au contraire.
§ Les associations doivent fédérer les synergies et les bonnes volontés.
§ Les associations doivent unifier les efforts et favoriser la diffusion des travaux de leurs membres.
§ Le fait pour une association d'initier un travail ne la rend pas propriétaire du travail de chacun de ses membres. Elle est par contre représentante des intérêts individuels de ceux-ci.
Pourquoi ce débat ?
Ce débat provient essentiellement d'une conjonction d'évènements indépendants.
1) la mise en ligne des registres BMS-NMD par les archives départementales
2) la fin d'un certain monopole de fait des associations sur les registres locaux
3) la fin clairement annoncée de la manne financière qu'a représenté le Minitel
4) le retard très important à la compréhension des implications des nouvelles technologies de communication et d'information
La déferlante Internet en bouleversant les habitudes de communication, tant de documents qu'entre individus, a mis en avant des exigences nouvelles de la part des chercheurs.
Les associations ont, très souvent, tout misé sur le Minitel et se sont confortées dans un mode de relation marchande, tant avec leurs adhérents qu'avec les non adhérents. Certaines en ont profité pour créer des emplois qui bien souvent ne se sont pas limités à de la gestion administrative, les rendant, de facto, indispensables. Au fait la gestion administrative justifiait elle toujours ces créations d'emplois?
En passant, de fait, un tel contrat marchand les associations ont de plus en plus d'adhérents consommateurs. Or le consommateur est exigeant tant sur la qualité que sur les coûts.
Avec Internet le consommateur adhérent s'est très vite rendu compte qu'il pouvait obtenir très facilement les mêmes informations gratuitement. Je ne dis pas sans bourse déliée.
Les réseaux d'entraides sont montés en puissance concurrençant directement les associations sur un terrain qu'elles ont, de fait, abandonné pour faire rentrer de l'argent dans les caisses. Nous avions des situations de budget de 15 à 20.000 € et plus par an hors cotisations et subventions.
Face à cette situation périlleuse les associations sont en train de chercher à sauver les meubles en mettant le maximum de freins à la libre diffusion des informations. Toutes s'offusqueront de cette affirmation mais c'est pourtant un constat pratique!
La création de moyens de communication a mis au jour nombre de généalogistes qui n'adhéraient pas aux associations. La constitution de réseaux a permis de travailler à distance sans se préoccuper de ce qui était fait, mais non accessible en pratique. Nous avons de nombreux cas d'associations qui se voient contournées par les généanautes, refaisant le travail effectué par les associations, et le mettant à disposition librement de tous.
La constitution de ces réseaux a permis aux adhérents éloignés de leur association de se voir ouvrir de réelles opportunités de travail et de communication.
Il est patent de constater que très peu d'associations ont un conseil d'administration éclaté aux huit coins de l'hexagone, ne parlons pas des Dom ni des Tom. Pourtant la technologie actuelle permet ce type de représentation.
La mise en ligne des Archives Départementales est en train d'accélérer ce phénomène de rejet des associations 'marchandes'. En effet il devient très facile de faire des relevés en étant aux antipodes et de mettre le fruit de son travail à disposition de la communauté. L'exemple de la Mayenne est l'illustration parfaite de mes propos.
Et les politiques?
Les politiques, tant au niveau national que local, vont devoir repenser intégralement leurs rapports avec les associations. En effet pourquoi subventionner des associations qui font de la rétention, de fait, d'informations collectives et publiques. Pourquoi ne pas aider des individus qui apportent à la collectivité le fruit de leur travail? Pourquoi subventionner des associations qui n'ont pas de réels objectifs ou rôles pour la protection du patrimoine commun. Pourquoi ne pas favoriser l'émergence de particuliers qui aident, de par la mise à disposition de leur travail, à la protection des originaux et participent activement à la vie des dépôts d'archives?
Les politiques ont aussi leur part de responsabilités dans ce phénomène. En effet en ne mettant pas les moyens de gestions et de diffusions des fonds ils ont contribué à ce fossé grandissant. En considérant la culture comme la dernière roue de la charrette et le patrimoine écrit la dernière de celle-ci puis les archives comme la dernière de ce dernier ils ont réduits, de fait, les moyens d'action des conservateurs.
Face à toutes ces questions il va bien falloir que les conseils d'administrations des associations rendent des comptes tant à leurs adhérents qu'aux contribuables représentés par les politiques...
Voilà qui pose clairement les bases d'une approche nouvelle des activités du "généalogiste amateur de base" !
Il restera à publier quelques cas de jurisprudence concernant l'illégalité de certaines clauses édictées par des associations de généalogie, voire également par des marchands de données.
Alors, demain, la généalogie trouvera un nouvel attrait pour le plus grand bien de tous.
Un coup de chapeau à Yannick...
Rédigé par : Gérard Mauvillain | 05 mars 2007 à 13:18
Bravo Yannick pour cette note pleine de bons sens et de vérité qu'il faut inlassablement répéter. Dans le même ordre d'idée, il fautdrait aussi parler des clauses abusives des AD qui interdisent l'exploitation des photos des archives prises en sein...
Rédigé par : Christophe Becker | 05 mars 2007 à 14:43
bonjour
merci pour ce texte, personnellement je l'ai imprimé.
Rédigé par : Sébastien AVY | 05 mars 2007 à 16:52
Merci à vous trois pour vos encouragements.
Mes excuses pour ne pas avoir répondu de suite à Christophe BECKER, je voulais voir passer un peu l'orage.
Le problème des AD est légèrement différent de celui des associations. Il devrait, aussi, être possible de le développer.
Sur ce point l'avis d'un spécialiste comme Joël SURCOUF doit être sollicité afin de bien clarifier les choses.
Amitiés
Rédigé par : Yannick VOYEAUD | 06 mars 2007 à 19:20
Bravo Yannick, pour vôtre courage .
Au moins , c'est clair .
amités
Rédigé par : jocelyne Boulain-cadiou | 08 mars 2007 à 10:08
Bravo Yannick pour ce texte tout en equilibre et nuances !!
Rédigé par : Guillaume | 08 mars 2007 à 10:30
Enfin quelque chose d'intelligent et sans polémique sur un sujet maintes fois débattu par des esprits confus et souvent avides. Bien sûr, nous attendrons tous et encore des initiatives des associations et cercles généalogiques mais de grâce, qu'ils fassent preuve d'un peu d'imagination ! Il est temps qu'ils se rendent à l'évidence, les relevés systématiques des registres paroissiaux, nous pourrons le faire (ou le refaire) sans eux, et nous les publierons GRATUITEMENT, ne les en déplaise.
Rédigé par : Crouail Pascal | 10 mars 2007 à 09:45
Je viens de m'apercevoir que sur mon site j'avais déjà fait un article sur ce type de sujet en juin 2003.
C'est sur http://voyeaud.org/Divers/Droit/Droits_auteur.htm
Certains ont la mémoire courte?!
Rédigé par : Yannick VOYEAUD | 14 mars 2007 à 20:58
Quelques infos :
Réalisation de tables des registres paroissiaux par les cercles généalogiques
[Le directeur général des archives de France a] été amené à étudier avec la Fédération le problème de la remise de ces dépouillements aux archives départementales et celui des conditions de leur communication."
http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/fr/circAD/DAFad91-2697.html
Rédigé par : France A. | 15 mars 2007 à 04:11
Bonjour
Je propose une petite suite sur les durées de copyright sur
http://www.francegenweb.org/blog/?2008/06/01/395-du-droit-d-auteur
Rédigé par : Guillaume | 02 juin 2008 à 14:20