Non, non, nous ne sommes pas dans des débats politiques, et je ne veux pas non plus me fâcher avec tous les gauchers du monde. Mais j'ai trouvé cette semaine un article assez intéressant sur Libé que je tiens à communiquer, car cela relève d'une étude de société...
« La science fait rarement du bon cinéma, mais le cinéma peut faire de la science amusante. Pour preuve, cette étude britannique qui, grâce à quelques centaines de vieux films retrouvées par hasard, vient de montrer qu’au début du siècle dernier, la proportion des gauchers en Angleterre était trois fois inférieure à ce qu’elle est aujourd’hui. D’où questions passionnantes et le titre original.
Il y a quelques années, un historien récupérait dans la cave d’un magasin de Blackburn (nord de l’Angleterre) 780 bobines tournées entre 1897 et 1913 par deux pionniers du cinéma, Sagar Mitchell et James Kenyon. Un chercheur de l’University College de Londres, Christopher McManus demande à l’un de ses étudiants de se cogner le visionnage image par image d’une partie de ces films afin de compter les gens qui faisaient coucou à la caméra avec la main gauche, et ceux qui le faisaient avec la droite – soit un échantillon total de 391 personnes. Car à l’époque être filmé était rare, et l’on faisait volontiers des signes à l’opérateur.
Le calcul a donné qu'il y avait avant 3% de gauchers parmi ces gens tous nés durant l’époque victorienne.
Pour comparer avec aujourd’hui, il a fallu former un «groupe témoin», ce qui a été fait d’une manière non moins originale : tout simplement en entrant le mot-clé waving («faire signe de la main», en anglais) dans le moteur de recherche d’images de Google, puis en déterminant sur ces milliers d’images fixes la proportion contemporaine de coucous de droite et de coucous de gauche, et enfin calculant comme plus haut la proportion de gauchers et de droitiers. Le calcul a donné cette fois 11 % de gauchers.
On sait, pour l’avoir mesurée, que la proportion de gauchers dans une population est assez variable suivant les pays, ou même les régions et les cultures. On possède par contre peu de données sur son évolution dans le temps. Le Dictionnaire des gauchers de Pierre-Michel Bertrand (Ed. Imago) cite une étude entreprise au début du XXe siècle sur 260.000 recrues de l’armée allemande, qui avait révélé un taux de gauchers inférieur à 4 %. C’est peu. Mais il y aurait eu plus de 10 % de gauchers dans la Rome antique, si l’on en croit une étude faite sur les bijoux en fil torsadé, objets à partir desquels a pu être estimée la latéralité des artisans (désolé, on n’a pas mieux sur l’époque).
Les gauchers n’ont pas toujours été bien vus, et il est possible que les éducateurs de l’Angleterre victorienne, en particulier, aient contrarié beaucoup d’entre eux. C’est du moins l’hypothèse que favorise Christopher McManus pour expliquer le faible taux révélé par les films de Mitchell et Kenyon.
Plusieurs études publiées ces vingt dernières années ont affirmé que les gauchers se blessaient plus souvent que les droitiers, que leur espérance de vie était plus courte et qu’ils avaient plus de chances de mourir à la guerre. Ce serait en partie dû au fait que notre environnement, conçu d’abord pour les droitiers, est un milieu hostile pour les autres. Depuis 1996, une revue (Laterality) est entièrement dédiée à ces questions, chez l’homme comme chez l’animal, et balaye ainsi un champ immense, où les sujets loufoques ne manquent pas : cet été, Laterality publiait un article sur le sens de rotation des boucles de cheveux chez droitiers et gauchers. Eh bien figurez-vous que les droitiers ont plus de boucles tournant dans le sens des aiguilles d’une montre que ces pauvres gauchers, qui n’ont décidément pas grand-chose pour eux. »
Sources :
§ Libération : Article de presse
§ LesGauchers : Site spécialisé sur les gauchers
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