Début décembre 2006, je lisais un article insolite dans mon journal les « Dernières Nouvelles D’Alsace », sous la plume de Jacques Fortier.
Il relatait qu’au XIXème siècle les paroissiens « abonnés » de la cathédrale de Strasbourg payaient entre 9 et 12 francs une chaise selon la rangée, 3 francs de supplément pour un prie-Dieu permettant de se mettre à genoux.
Cela m’a rappelé une autre coutume du même ordre qui avait cours dans de nombreuses localités d’Alsace jusqu'à la dernière guerre 1939-45. Entre Noël et Nouvel An se situait un épisode lié aux dévotions mais nettement plus haut en couleur que la pratique benoîte et feutrée de la cathédrale.
Normal, sorti de la grande ville, dans les bourgades on se connaît, on observe moins de conventions et de réserve. Tout peut être prétexte à un peu d’animation, donc cette dernière semaine de décembre, au jour choisi et chaumé, les chefs de famille s’endimanchaient et se rassemblaient pour… participer à la mise aux enchères des places dans l’église pour toute l’année à venir.
Les femmes restaient modestes et discrètes dans leur foyer, tandis que les gamins turbulents et curieux tentaient de glisser un coup d’œil pour rendre compte du déroulement de l’évènement.
Alors, pour les pères et maris, il fallait faire bonne figure et miser judicieusement afin d’obtenir le meilleur rang possible. On ne voulait pas perdre la face devant ses voisins, on enchérissait autant que le porte-monnaie le permettait. Tous s’échauffaient, s’agaçaient, se raillaient et si on emportait les bonnes places, on se rengorgeait au grand dépit des moins chanceux ou moins argentés.
Une fois les enchères terminées, afin de célébrer sa chance ou au contraire de se réconforter entre éclats de rire ou éclats de voix, tous ses Messieurs ralliaient les auberges. Là quelques bières délicieuses bien fraîches ou verres de vin d’Alsace doré comme le soleil d’hiver, accompagnés de bretzels ou d’une paire de knacks raccommodaient les amitiés.
Ce genre de réunions conviviales se produisaient pour bien d’autres faits liés à la religion : l’installation du nouvel évêque ou du nouveau curé, les mariages qui pouvaient durer trois jours avec une foule de parents et amis, les baptêmes avec lancé de piécettes et dragées, la Fête Dieu avec sa belle procession accompagnée de tout un cérémonial… et tant d’autres encore qui rythmaient la vie de nos ancêtres comme autant de repères rassurants au fil des ans.
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