Au début étaient des îles paradisiaques en arc tendu devant l'Amérique Centrale - Vierges d'humains et en paix avec la création. Les premiers occupants Méso-Indiens sont arrivés sans doute il y a 5 à 6.000 ans. Peu de traces sont restées des ciboneys.
Entre « 0 » et 350 après J.C. (en Europe sous l'empire romain), un peuple pacifique, les Arawaks - Améridiens qui avaient entamé une migration vers le nord à partir du Vénézuela atteint les petites Antilles. Ils étaient agriculteurs, pêcheurs, poètes et céramistes. La trace de leurs installations a été retrouvée sur la côte atlantique des îles. Aux environs de 950 (époque de Louis IV) ils ont subi les attaques des indiens caraïbes qui les ont vaincus. Ces derniers arrivaient également d'Amérique du Sud (bassin de l'Orénoque).
Guerriers belliqueux et cannibales, ils ont éliminé les hommes Arawaks tout simplement en les mangeant. Ils ont gardé les femmes évidemment. Ainsi les deux peuples se sont métissés, et la langue Arawak a subsisté parallèlement au Caraïbe (diglossie = 2 langues).
La déchirure dans la destinée des amérindiens s'est produite au moment où le vieux monde est parti à la conquête du nouveau, en 1492 (Renaissance, Louis XII, François Ier, imprimerie...) Christophe Colomb aborde l'Amérique. De 1492 à 1625, les Caraïbes luttent contre les espagnols. Toutes les nations maritimes à leur tour veulent leur part du gâteau américain.
A son 4ème voyage Christophe Colomb en 1502 débarque au Carbet côte nord Caraïbe de la Martinique (Madinina). La beauté du site le séduit.
Mais après avoir aperçu d'innombrables serpents trigonocéphales venimeux et compte tenu de l'appétit des caraïbes cannibales, il avait abandonné Madinina qui comptait environ 5 à 6.000 indigènes. Le 25 Juin 1635 Liénard de l'Olive y prit pied symboliquement à son tour un peu plus au Sud à Fond Layet. Il ne s'y attarda pas à cause... des serpents ! C'est en fait d'Esnambuc qui est venu créer le premier établissement près du Carbet, ce fort militaire s'est appelé : St-Pierre.
Les débuts de la colonie sont mouvementés : serpents, famine, fièvre jaune, agitation des premiers engagés européens. Ils sont sous contrat pour 36 mois en échange de leur voyage. Ils devaient travailler durement avant d'être libres de s'installer à leur compte et de bénéficier d'une pièce de terre.
Belain d'Esnambuc avec l'appui de Richelieu avait fondé la compagnie de St-Christophe le 31/10/1626. Duparquet, neveu de Belain d'Esnambuc a construit en 1638 le Fort Royal (Fort de France). Il a fait appel à des colons normands et a accueilli juifs et protestants hollandais chassés du Brésil. Ces derniers maîtrisaient parfaitement la fabrication du sucre.
Le premier gouverneur général, de Poincy; prend ses fonctions. Après la faillite en 1649 de la première compagnie des Isles, Duparquet rachète pour 60.000 livres la Martinique, Sainte-Lucie, Grenade et les Grenadines. Les indiens Caraïbes se rendent compte que leurs anciens alliés sont en train de les éliminer. Il s'agit d'un véritable génocide. Les caraïbes plutôt que d'être massacrés se suicident en sautant du haut des falaises. Il n'en subsistera qu'un petit nombre dans une réserve de la Dominique, une des îles voisines. Ici où là certains individus s'intègrent dans la population.
Les blancs sont satisfaits, enfin, ayant exterminé les autochtones, ils ont fait place nette. Surtout que ces indiens récalcitrants n'étaient même pas de bons travailleurs esclaves. De plus le père dominicain Bartolomé de las Casas, horrifié des tortures qu'on infligeait à ces êtres avait réussi lors de la controverse de Valladolid à faire reconnaître qu'ils étaient des hommes et avaient une âme.
Les survivants ayant réchappé des maladies européennes, mortelles pour la majorité d'entre eux et aux mauvais traitements ne feront plus parler d'eux. Une langue mixte franco-caraïbe était apparue vers 1640 appelée « baragoin ».
Entre les mines du continent américain et la culture de la canne à sucre introduite aux îles en 1639, il y a un urgent besoin de main d'oeuvre. Le sucre à cette époque représente de l'or. A cela s'ajoute le tabac, les épices, les bois précieux.
Il faut des bras, des bras robustes et pour que le profit soit maximum que cela ne coûte rien ou fort peu. La solution « l'esclavage »...
On connaît l'esclavage pratiqué par les civilisations antiques, Egyptienne, Grecque, Romaine et Arabe (environ 17 millions de noirs envoyés vers le Maghreb et le Moyen-Orient du 7è au 20è siècle). On peut se souvenir aussi pour cette dernière, de la capture par les barbaresques de l'espagnol Cervantès l'auteur de Don Quichotte. Il fut ainsi esclave à Alger durant cinq années de 1575 à 1580. Il retrouva sa liberté grâce à des religieux qui le rachetèrent aux arabes. Il y eut des cas innombrables similaires.
Mais revenons à la France elle-même. Dans le grand dictionnaire encyclopédique Larousse, on peut lire aux mots « serf et serve : du latin servus - esclave dont la personne et les biens dépendent d'une autre personne : paysans serfs ». En fait le statut de serf médiéval procède directement de l'esclavage antique.
Au XIe siècle en France, les hommes et les femmes que l'on appelle « serfs » ne s'appartiennent pas ; ils sont tous la propriété d'un maître qui détient sur eux un pouvoir absolu. Il peut les donner et les vendre. Il les châtie à sa guise. Ils sont tenus d'obéir à tous ses ordres ; leur « service » ne connaît aucune limite et ne donne droit en principe à aucune rétribution... Leurs enfants sont également dans l'entière possession du Maître, La condition servile est en effet héréditaire, se transmet par la mère, « Un serf ne peut se marier sans l'autorisation du maître de son corps ».
En 1135 Louis VI affranchit les esclaves sur ses terres. Le roi Louis X dit le Hutin promulgue un édit le 3 juillet 1315 qui en élargit l'application au royaume entier. Cependant une forme atténuée de servage subsiste jusqu'en 1789. Les serfs restent attachés à la glèbe. Mais le christianisme par le biais du mariage religieux des serfs a apporté une amélioration notable.
Tous les pays européens au moyen-âge ont appliqué le même genre de servitude. Cette France esclavagiste de l'époque est plus ou moins occultée dans les livres d'histoire scolaires. On parle de paysans serfs mais sans trop stigmatiser cette pratique. Mais cette culture de l'esclavage va retrouver une nouvelle application avec la colonisation.
Cette dernière était une dévoreuse de travailleurs. Où pouvait-on trouver des individus forts et solides dont la civilisation surtout agraire, non technique (pas d'armes à feu, de machines...) en faisait des proies faciles : en Afrique. Et ce d'autant plus que l'esclavage existait déjà là-bas (environ 14 millions d'esclaves pour 13 siècles) à l'état endémique en raison des guerres inter-ethniques. Les prisonniers étaient réduits en esclavage. Les arabes en achetaient, en razziaient depuis fort longtemps également.
La traite organisée par les européens s'est faite à grande échelle et dans des conditions abominables (entre 11 à 14 millions environ de noirs déportés).
La suite de cet article sera diffusée dans une prochaine note...
Liens :
§ Serge Bilé - Paroles d'esclave, 31 vidéos émouvantes de témoignages de petits-enfants et arrière petits-enfants d'esclaves, pour la plupart très âgés.
§ Domtom-Genea - Plusieurs liens sur l'esclavage et le code noir
§ Benoît Fichet - Cartes et plans ancienne
Dessin : ©Caraïbes au Carbet - JP Apprill
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