Le 17 avril 2006, une Québécoise de la région de Montréal déposait à la Chancellerie du Consulat de France une requête afin que lui soit délivré un passeport par les autorités administratives françaises.
La requérante joignait à sa demande un mémoire où il est démontré que, bien qu'elle soit née au Québec de parents québécois d'ascendance française, elle serait toujours une naturelle française, au même titre que ses ancêtres français venus s'établir en Nouvelle-France.
Ce mémoire démontre, pour l'essentiel et avec autorités à l'appui, que le traité de Paris de 1763, quoique formellement ratifié par le roi de France et enregistré par le Parlement de Paris, n'aurait jamais dépouillé les habitants de la Nouvelle-France de leur statut de naturels français, laissant intact leur droit, confirmé par deux ordonnances royales, d'aller, de retourner ou d'habiter en France, à leur choix, quand bon leur semblerait, et ce, sans être tenus de prendre aucunes lettres de déclaration ni de naturalité.
Selon l'argumentation présentée dans le dit mémoire, cet état de fait serait dû à des vices de forme et de consentement commis lors des négociations du traité de paix. Ainsi, en vertu des lois fondamentales du royaume de France, les rois, bien que seuls habilités à conclure des traités, ne pouvaient céder légalement aucun territoire ni aucune parcelle du domaine de la Couronne sans avoir, au préalable, obtenu l'assentiment des états Généraux du royaume; ce qui ne fut jamais demandé.
De même, toujours en vertu des dites lois, les rois de France ne pouvaient céder légalement leurs sujets ni aucun peuple du royaume sans avoir demandé, et obtenu, leur consentement; ce qui n'a jamais eu lieu non plus. Ces deux graves omissions s'expliquent par le fait que les rois de France et d'Angleterre se sont trop empressés de conclure leur traité de paix en omettant, sciemment, de se conformer à des dispositions incontournables du droit constitutionnel français.
Bien qu'il soit incontestable que Louis XV a bel et bien signé, de sa main, le texte final du traité de paris, il n'en demeure pas moins qu'il a omis, tout d'abord, de convoquer les états Généraux et, par la suite, de solliciter auprès des habitants de la Nouvelle-France leur consentement à devenir les sujets du roi d'Angleterre. En d'autres mots, et pour paraphraser une formule plus contemporaine, le droit constitutionnel français leur garantissait le droit de donner une réponse claire à une question claire avant qu'ils ne puissent être cédés légalement à un souverain étranger, ce qui ne fut même jamais abordé avec la population concernée.
Ironiquement, les autorités anglaises étaient bien au fait de ces particularités propres au droit constitutionnel français, mais, tellement empressées de conclure l'entente convoitée, elles ont consenti à s'engager dans un traité alambiqué, portant en lui-même les germes de sa propre destruction. Ainsi, les habitants de la Nouvelle-France ont été cédés à un souverain étranger en violation de leurs droits constitutionnels, droits pourtant explicitement garantis par deux ordonnances royales.
Force est donc de conclure que ces habitants n'ont jamais perdu leur statut de naturels français, que leurs descendants ont conservé ces mêmes droits, et que la démarche de la requérante est strictement fondée en droit.
Pour en savoir plus :
§ Impératif français : Dossier de Marie-Mance Vallée
§ Agoravox : Article de Bertrand C. Bellaigue
§ Frontenac-Amériques : Traité de Paris (1763)
§ Herodote : Conséquences du traité de Paris (1763)
Il était temps qu'il y en ait "au-moins-une"
Rédigé par : patrick valas | 09 juillet 2012 à 01:37